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Joan-Claudi Dugros - Page 37

  • Cronica de toponimia, per Joan-Claudi Dugros

    Après les « chafres » (sobriquets) qui sont à l’avantage de la personne, comme toute médaille à son revers, les travers et les vices que nos anciens ont su déterminer chez leurs contemporains perdurent encore aujourd’hui chez des porteurs qui n’en sont plus du tout responsables… 

    Los chafres : Canin, Canhard, Rechinhac

    Le nom de personne Cany est présent en Dordogne. L’occitan canin (du latin caninus) signifie « rude, âpre, sauvage ». Il a pu donner un sens figuré de « revêche, récalcitrant, mauvais coucheur ». Il est peut-être en deuxième élément dans le toponyme composé  Pécany à Saint-Chamassy : « la colline de la famille Cany. »

    La Cagnardie à Grand-Brassac est le domaine de la famille Cagnard ou Caignard, présente en Périgord. L’occitan canhard, dérivé péjoratif de can « chien », désigne un individu repoussant de saleté ou aussi un fainéant invétéré. On peut peut-être y ajouter les diminutifs Cagnolle à Cercle (aujourd’hui Gagnole à La Tour-Blanche-Cercles) et Cagnolle à Saint-Amand-de-Belvès. En pleine canicule (du latin canicula « petite chienne »), avèm la canha (on a la flemme) d’aller en plein cagnard (lieu où le soleil tape fort)…

    Rechignac à Brantôme (ou Richignac) : le nom de famille Rechignac (Rechignat) a son maximum en Dordogne. « À l’origine, il s’agissait d’un surnom correspondant au participe passé adjectival du verbe occitan rechinhar (« ricaner », et à l’origine « montrer les dents en grimaçant »). (Jean-Louis Lévêque), mais pour Réchignac à Chalais et à La Coquille, Yves Lavalade privilégie un « nom de domaine gallo-romain formé à partir du patronyme *Reccinius avec suffixe celtique –acos (la propriété de…). Comme le Recquignies de Maubeuge (Nord), porté Rechignies en 1257. » 

  • Cronica de toponimia, per Joan-Claudi Dugros

    Suite de la série proposée par Jean-Claude Dugros sur les noms de famille ou de toponymes qui font références aux sobriquets, les fameux « chafres ». Poursuivons la découverte de ceux d’ordre moral. 


    Los chafres : Amorat, Amorós, Fringaire, Pinard...

    Et l'amour ? Fine ou non, elle est toujours vivante et vivifiante avec la Fontaine de l'Amourat à Saint-Laurent-sur-Manoire. L'Amorat est le surnom d'une personne citée dans Le Livre Noir de Périgueux (participe passé du verbe occitan s'amorar « devenir amoureux »), citée avec Johan d'Amoretas (diminutif pluriel de amor « amourettes »), des coureurs de jupons ?

    La Fontaine de L’Amouroux à La Roche-Chalais et le Terme de Lamouroux à Saint-Capraise-d’Eymet, bien que plus récents, perpétuent le surnom d'amorós « amoureux »… 

    Peter Nollet a relevé à Saint-Aubin-de-Nabirat, À la Combe du Fringayre. Voilà un plaisant surnom. L'occitan fringaire désigne « l'amoureux, galant, jeune homme fringant ».

    Johan d’Astais (forme populaire de Anastasi), dit Lo Mascle (occitan mascle « mâle ») a un surnom qui peut aussi évoquer la paillardise à côté d'autres expressions de la virilité (la force…).

    La Pignardie  à Saint-Front-de-Champniers, en 1451, est dite aussi La Pinardie, ce qui fait penser au domaine du nom de personne Pinard (toujours présent en Dordogne). L'occitan pinard désigne « un cultivateur aisé et bon enfant, en bas Limousin » (Mistral).

  • Cronica de toponimia, per Joan-Claudi Dugros

    Suite de la série proposée par Jean-Claude Dugros sur les noms de famille ou de toponymes qui font références aux sobriquets, les fameux « chafres ». Poursuivons la découverte de ceux d’ordre moral. 

    Los chafres : Savi, Prolhac, Paratge

    L'occitan savi, sabi, sapi signifie « sage » mais aussi « savant » (à l'origine la « sage-femme » était « femme de savoir, femme d'expérience »). 

    Bossavy à Payzac (forme ancienne Boissavy, Beausavi) : le bois appartenant à Savy, patronyme laudatif (sage, avisé), Peut être aussi nom de baptême Sabin (latin Sabinus). Les Sabines à Capdrot et Bois des Sabines à Proissans, sont peut-être des féminisations. Sabeyrou à Brantôme, relevé par Jean-Louis Lévêque : « Sabeiron, nom ou surnom de personne, diminutif dérivé du nom commun saber (savoir, connaissance) : petit savant. » 

    « Dans la Chanson de la Croisade (XIIIe siècle) le fils du comte de Foix es gentils e savis e a valor e sen (« il est aimable, sage, valeureux, de bon sens » ; laisse 197, vers 6). Que demander de mieux ? » (Yves Lavalade). 

    Les toponymes Prouillac à Payzac, à Manaurie, à Plazac, Prouilhac à Rouffignac-Saint-Cernin-de-Reilhac, Les Prouillacs à Saint-Amand-de-Vergt, peut-être Chez Prougnac à Mareuil, sont des noms de domaine gallo-romains, de Probilius-acum (de probus « loyal, de bonne qualité, honnête, vertueux »). Yves Lavalade envisage aussi pour ce toponyme le latin Proculus (enfant né tardivement) : comme le sens-tu-fariam occitan, que l’on pourrait traduire humoristiquement par « on se serait bien passés de toi »).

    Les Paratgies à Vitrac (A las Pararias entre Montfort et Sarlat en 1170, Mol. voc. de las Parorias, en 1475) fait peut-être référence au mot-clé de la lyrique occitane paratge : « lignée, noblesse ; vertu féodale occitane (XIIIe siècle) ». Les noms de personne Parachou (bien présent en Dordogne) et Parajoux (en Creuse) y font référence.