Le Carnaval et la lune, par Michel Chadeuil
Le carnaval est une fête mobile, fête bien peu chrétienne, mais l’Église a pu faire croire qu’elle l’était en plaçant le lendemain, le début du Carême. Mobile ? Peut-être pas pour nos anciens qui ne comptaient pas le temps comme nous et connaissaient les « lunes » mieux que les mois. Le carnaval a donc lieu régulièrement le premier mardi qui suit la lune nouvelle de février, ce qui justifie le proverbe : « Sus lo tard o d’en-prumier Carnaval tomba en feurier ». Tard ou tôt, carnaval tombe en février.
Or en l’an 2000, il est tombé le 7 mars, en 2003 le 4 mars, en 2011 le 8 et en 2013 le 4. En 2019, il tombera le 5 mars. Les proverbes anciens (mais en existe-t-il des modernes ?) correspondent donc à des mois lunaires et non à notre calendrier actuel. Quand on sait l’intérêt que les paysans ont toujours apporté à la lune pour guider leurs travaux, on n’en sera pas étonné. « S’es totjorn vist dimarç lardier En luna nueva de feurier ». On a toujours vu le mardi gras en lune neuve de février. « Carnaval estelat o sens estela Mas totjorn luna novela ». Carnaval étoilé ou sans étoiles, mais toujours en lune nouvelle.
Cette phase lunaire est marquée par la lubricité bruyante des chattes. Ne dit-on pas qu’alors « chantan carnaval », elles chantent carnaval. « Per carnavau Chata lunada Fringa Margaud Sus la teulada ». Pour Carnaval, chatte lunée (en chaleur) fait des avances au matou sur le toit.
Et pour les humains ? « Carnaval sens luna, De cent piucelas pus una ». Carnaval sans lune, de cent pucelles plus une.
Micheu Chapduelh